mardi 14 avril 2015

Angélus

Les gens de mon âge gardent souvent, imprimé au fond de leurs souvenirs inconscients, ce tableau de Jean-François Millet, peint il y a un siècle et demi, qui décorait les murs de leur enfance. Au-delà de la qualité picturale de l’œuvre, c’est la charge spirituelle de son sujet qui m’émeut. Ce couple, dans son champ, qui pose un instant ses outils ; cette femme qui joint les mains ; cet homme qui ôte sa casquette alors que l’on croit entendre au loin tinter au clocher du village les neuf coups suivis de leur pleine volée de “l’angélus qui sonne” ; cette image est celle de nos racines, la pensée chrétienne qui a modelé la France et les Français. Depuis cinq siècles et demi, depuis Louis XI qui ordonna de faire sonner l’angélus en France, le matin, à midi et le soir, vingt générations de nos grands-mères joignirent les mains, vingt générations de nos grands-pères ôtèrent leur casquette (soit 2.097.150 aïeux), trois fois par jour, pour invoquer Marie, appeler son secours et sa protection. Aujourd’hui, les cloches dérangent, les ancêtres dérangent, l’au-delà dérange. À l’âge des smartphones et d’internet, où seul compte le présent de l'instant, j’ai  voulu rappeler que chacun a un passé, et que chacun sera le passé de quelqu'un.

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