lundi 12 mai 2014

Quelle Europe ?



J'avais 15 ans. Deux journaux paraissaient alors, que je lisais régulièrement. L'un s'appelait "L'Europe fédérale", l'autre "L'Europe confédérale", je crois. Dans celui-ci, Michel Debré écrivait. D'autres personnalités que j'ai oubliées s'exprimaient dans le premier. 
Pourquoi, à un âge où l'on est plus volontiers attiré par les BD, m'intéressais-je à ces titres trop sérieux ? Parce que ma génération de jeunes sortait de la guerre et de ses horreurs, et que nous avions le sourd pressentiment qu'autour de ces idées d'Europe se construirait notre avenir d'adultes.
Plus de 60 ans ont passé. Plus d'un demi-siècle. Deux générations ! Ma vie d'adulte s'est déroulée sans Europe. Aujourd'hui, ce sont mes petits enfants qui ont l'âge que j'avais alors. Et ils ne savent toujours pas quelle sorte d'Européens ils seront, et s'ils le seront jamais. 60 ans pour rien !
On a fabriqué l'Euro. Cela aurait dû être le résultat de la construction d'une Europe. On a décrété du résultat sans faire le travail. On a fait la monnaie, on n'avait pas l'économie. On a mis en place des députés, on n'avait pas le peuple européen pour les élire. On a recruté des fonctionnaires, on n'avait pas de gouvernement pour les diriger. On a mis la charrue devant les boeufs. On a fait une Europe factice, tant certains étaient pressés de prendre les bonnes places. Des carrières se sont faites, des fortunes aussi. Aujourd'hui, l'on veut nous faire voter pour désigner ceux qui vont à leur tour profiter de ces prébendes. 
Ce n'est pas de cela que les peuples ont besoin, mais de vivre ensemble, à l'intérieur de frontières communes, pour un destin commun. Il ne s'agit pas de renoncer à l'Europe en s'enfermant derrière une
chimérique ligne Maginot, mais de travailler à la construction d'une Europe d'Européens. Ah ! Si Vercingétorix ne s'était pas sottement enfermé dans Alésia, César n'aurait pas romanisé la Gaule, la face du continent en eût été changée. L'Europe serait une réalité humaine, économique, culturelle, depuis
longtemps.
On dira que l'obstacle des langues complique le problème. Là encore, si l'école avait fait son travail, au lieu de faire de la politique, tous nos enfants parleraient couramment au moins trois langues européennes, et le problème n'en serait plus un. Ils ânonnent les langues étrangères, pire que nous il y a 60 ans, qui ne connaissions pas les médias modernes d'apprentissage !
Alors j'irai voter, si je trouve une liste, quel qu'en soit le parti - je dis bien : quel qu'en soit le parti - qui offre de travailler à la construction de cette Europe-là.

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